Gabriel est notre troisième enfant. Il est né en 2005 par accouchement déclenché à 40 SA pour cause de RCIU non expliqué. Sa taille était alors à -3.3 DS, son poids -2DS, mais il allait « bien » nous disait-on. Nos deux autres enfants se situent eux au-dessus des courbes de croissance.
Pour autant, Gabriel mangeait très difficilement, par toutes petites quantités, il transpirait beaucoup et se montrait vite fatigué. Malgré tous nos efforts pour l’alimenter, il ne récupérait pas son retard staturo-pondéral.
Etant inquiets, nous avons commencé l’exploration des causes de son retard staturo-pondéral dès ses un an. C’est pour ses deux ans que le diagnostic de syndrome de Silver Russell a été posé.
Paradoxalement, c’était pour nous un soulagement de mettre un mot sur tout ce qui nous préoccupait : son absence d’appétit, sa très petite taille, son faible poids, ses transpirations excessives,.
Quelques mois plus tard, le traitement par hormones de croissance nous a été proposé. En sachant que celui-ci pouvait non seulement aider Gabriel à grandir mais aussi augmenter son appétit et réduire les risques d’hypoglycémie fréquents et dangereux dans ce syndrome, nous l’avons accepté.
Dès la naissance de Ga briel, nous avons compris que si on le laissait faire, ses apports caloriques n’étaient pas suffisants. La bataille pour faire manger Gabriel était dure, et les parents gagnent difficilement cette bataille. sur les conseils d’un nutritionniste, nous avons essayé de lui donner des compléments alimentaires pédiatriques, les nutrinidrinks. A 3 ans et demi, ces compléments constituaient 50% de ses apports caloriques. A 5 ans et demi Gabriel en boit encore la nuit dans un biberon. Nous savons bien que ce n’est pas l’idéal, mais entre plusieurs maux nous avons choisi le moindre.
Depuis que nous avons commencé les hormones de croissance, Gabriel mange plus volontiers, même s’il est vite rassasié, il a parfois « faim » ce qui ne lui arrivait jamais avant le traitement ! Il n’y a plus d’épisodes où l’haleine de Gabriel sentait l’acétone. Gabriel régule ainsi ses apports caloriques en mangeant varié mais par petites quantités la journée, et compensant ce qui lui manque en buvant le nutrinidrink la nuit. Aujourd’hui à 5 ans et demi il a enfin un bon rapport poids/taille d’environ 90%. Bien sûr il n’est pas épais, il ne mettra jamais les pantalons des aînés, trop grands, nous devons ruser pour chercher des vêtements adaptés, mais on y arrive. Pourtant, nous avons dû faire face en mai 2010 à une décision, incompréhensible en ce qui nous concerne, de déremboursement du nutrinidrink qui est passé d’une prise en charge de 100% à 0%, et la mutuelle a suivi dans le 0%…Comme il n’y a aucun produit pédiatrique équivalent en terme de protéines et de calories adapté à sa corpulence, et que Gabriel a trouvé avec ce produit un équilibre qui lui réussit bien, nous avons continué d’acheter le nutrinidrink ce qui représente une dépense de plus de 250 euros par mois.
A deux ans, Gabriel avait du mal à finir ses demi-journées en crèche, s’endormant avant la pause déjeuner.ce qui n’arrangeait rien. Depuis le commencement du traitement aux hormones de croissance, Gabriel est moins fatigable, il a plus de tonus. Avec le relais d’une compote à la récréation, Gabriel peut rester concentré à l’école une demi-journée. Comme il est très loin d’être monsieur muscles, nous avons inscrit Gabriel à un club de multisports puisque nous savons que nous devons faire attention à son équilibre métabolique. Nous sommes persuadés que ce sont les hormones de croissance qui ont permis à Gabriel d’évoluer ainsi, qui lui ont donné le tonus nécessaire à son intégration scolaire et extra-scolaire, il se rapproche ainsi de la normalité même s’il reste très entouré et que ses parents sont très vigilants.
La piqûre d’hormones est une formalité pour lui, elle fait partie du rituel du coucher, il a même été jusqu’à la réclamer à la babysitter.
Du point de vue de la taille, Gabriel rattrape doucement mais sûrement ses petits camarades, il est encore le plus petit des garçons de la classe, mais la différence n’est plus d’une tête. L’effet du traitement par hormones de croissance a été rapidement visible dès la première année. Les remarques des gens que nous croisons se font moins fréquentes. En effet, que de remarques n’avons-nous dû essuyer au cours de la petite enfance de Gabriel, avant qu’il ne soit traité par HC. Gabriel se débrouillait très bien pour son âge, mais vu sa corpulence, on le pensait plus jeune, puis quand nous évoquions son âge, c’était en face de nous la consternation. Nous avons même parfois fini par mentir sur son âge pour ne plus être confrontés à ces questions et remarques indiscrètes et surtout irrespectueuses pour notre enfant. Nous sommes soulagés que le traitement par hormone de croissance ramène Gabriel à une corpulence certes faible mais moins anormale, moins handicapante. Cela dit, nous savons que rien n’est gagné tant que l’étape de la puberté n’est pas passée, que le traitement aux hormones n’est pas terminé, et la taille adulte atteinte. Nous n’avons pas de vision de basketteur pour Gabriel, nous souhaitons juste que le traitement par hormones de croissance l’aide à grandir suffisamment pour décoller de ce mauvais départ à -3.3DS.
Gabriel est suivi deux fois par an par le centre de référence du syndrome à Trousseau. Il y est pris en charge par des consultations multidisciplinaires : endocrinologie et gastroentérologie bien sûr, mais aussi O.R.L et maxillo-facial, nos enfants SSR ont en effet une hypomaxillie qui peut entraîner des problèmes de dentition, voire de sommeil. Gabriel est suivi par une orthophoniste spécialiste des troubles de l’oralité. S’il a quelques problèmes encore de prononciation avec les lettres qui viennent du fond de la bouche, puisqu’il n’explore pas volontiers sa bouche, néanmoins il progresse bien et est prêt pour le CP. Une évaluation neuropsychologique a montré qu’il avait de bonnes capacités, « Gabriel est un petit garçon intelligent et attachant ».
Gabriel évolue bien et c’est sans nul doute grâce à une bonne prise en charge globale de son syndrome où l’hormone de croissance joue un rôle essentiel.
S’il a été et est parfois encore difficile pour nous ses parents d’accepter la maladie génétique rare de notre enfant, il est incompréhensible que nous devions en plus nous battre pour que notre enfant puisse avoir accès aux soins qui améliorent sa santé. Après le déremboursement du nutrinidrink, il est question d’une réévaluation du service médical rendu de l’hormone de croissance pouvant conduire à son déremboursement de manière isolée en France, et tout cela alors qu’on parle de plan maladies rares.Comment expliquer cela à nos enfants ?
Les parents de Gabriel